Comme son nom l'indique, un ABM se base avant tout sur des agents.Un agent est une personne fictive, autonome, à rationalité limitée.Chaque agent agit dans l'environnement en fonction de ce qu'il perçoit être dans son intérêt.Ce processus de décision est régi par un ensemble de règles définies par le data scientist à la lumière de discussions avec des experts du domaine d'application.Un ABM sera alors créé à partir d'un grand nombre d'agents (on peut par exemple considérer l'ensemble des français) qui vont, chacun leur tour ou simultanément, interagir entre eux et pourront également être exposés à un contexte.
Pour mieux comprendre les ABM prenons deux exemples d'applications :
Le premier est le modèle de ségrégation de Schelling développé par l'économiste Thomas Schelling.L'objectif de ce modèle est de comprendre la ségrégation dans la société.Ce modèle simple considère deux types d'agents, les agents de type A et les agents de type B. Les deux types d'agents n'existent pas dans les mêmes proportions, on prend généralement 20 % de type A et 80 % de type B. Chaque agent est alors placé sur une grille d'une taille suffisante pour laisser des places libres.En dessinant un rond bleu pour un agent A et rouge pour un agent B, on peut donc avoir l'état initial suivant :
Le processus de décision d'un agent est alors le suivant :
Le voisinage est défini par les 8 cases autour de l'agent (ou moins si l'agent est sur un bord).Le modèle va alors fixer un certain niveau d'homophilie puis laisser les agents agir jusqu'à ce que plus personne ne déménage.On va ainsi pouvoir observer le niveau de ségrégation finale en fonction du niveau d'homophilie d'entrée.
Les simulations montrent que même avec des niveaux d'homophilies faibles (au moins 3 voisins du même type), on arrival à des représentations avec beaucoup de ségrégation :
Un deuxième cas d'application, que nous détaillerons moins, est la diffusion de pandémie.On va donc définir un grand nombre d'agents représentatifs d'une population avec certains agents infectés, d'autres sains.Les caractéristiques des agents peuvent également prendre en compte beaucoup d'autres paramètres comme leur âge, leur lieu de vie, leur niveau de santé, leurs antécédents médicaux etc.Chaque agent pourra alors se déplacer, rencontrer son voisinage et donc transmettre le virus, se remettre du virus, être infecté, devoir être hospitalisé, etc.On va également pouvoir mettre en place des facteurs externes qui vont impacter le comportement des agents comme par exemple le port d'un masque obligatoire, l'interdiction de déplacement, la vaccination, etc.Cela va permettre d'étudier la diffusion d'un virus en fonction de son niveau de contamination et des directives prises par le gouvernement.Ces modèles sont fortement étudiés et utilisés en ce moment.
Il y a deux grandes façons d'utiliser les ABM. La première, comme présentée dans les exemples précédents, est de comprendre un environnement et l'impact de différents scénarios hypothétiques au sein de cet environnement.On va donc tester des valeurs différentes pour les paramètres du modèle et observer les conséquences.La deuxième consiste à répliquer un environnement existant pour le comprendre.En marketing, on va pouvoir chercher à comprendre le processus d'achat d'un utilisateur en fonction de la stratégie marketing de l'entreprise et de la stratégie de la concurrence.Il y a alors énormément de paramètres dans le modèle (la probabilité d'être exposé à une publicité sur un canal donné, l'impact de la publicité sur le processus de décision de l'agent sur chaque canal).On obtient alors des modèles très complexes avec beaucoup de paramètres don't les choix vont avoir un fort impact sur les résultats finaux, comme le chiffre d'affaires de l'entreprise et l'image de la marque.Pour valider la cohérence du modèle et vérifier que celui-ci permet de capter correctement les comportements des individus au sein du marché, il faut passer par une étape de calibration.Cette étape consiste à trouver les bons paramètres de sorte à obtenir des simulations qui répliquent les résultats de l'entreprise.Pour cela, il faut d'abord choisir des paramètres initiaux, puis simuler le comportement des agents et enfin comparer avec les résultats agrégés réels. On va ensuite tester d'autres paramètres et comparer à nouveau jusqu'à obtenir un niveau d'écart suffisamment faible entre la simulation et la réalité.
Ce processus est très coûteux en temps de calcul ce qui a conduit à longtemps simplifier les modèles pour limiter le nombre de paramètres.Aujourd'hui le cloud computing permet de plus facilement calibrer les modèles et donc d'obtenir des résultats bien plus significatifs et activables pour les entreprises.
Enfin, il est également possible de développer des ABM plus simples dans le but de répondre à une question précise.On développera par exemple dans une autre série d'articles les cas d'usages suivants : quand lancer une campagne de communication massive après le lancement d'un nouveau produit ?Comment gérer le niveau de promotion au fil du temps pour maximiser la marge ?
Les applications des ABM au marketing sont donc très prometteuses et particulièrement adaptées au contexte actuel.En effet, il est de plus en plus difficile d'obtenir des informations granulaires sur le comportement des consommateurs.Les ABM permettent donc de simuler ces comportements de sorte à répliquer le marché et ainsi mesurer, comprendre et simuler les conséquences de différentes stratégies.
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